parution juin 2013
ISBN 978-2-88927-774-2
nb de pages 144
format du livre 105x165 mm

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Aude Seigne

Chroniques de l'occident nomade (poche)

résumé

Bourlingueuse du xxie siècle, Aude Seigne écrit avec acuité et souplesse. Ses chroniques sautent allègrement d’un continent à l’autre, mettent en correspondance des pays et des bouts de souvenirs, des images, des gens, comme autant d’éclats de cet « état nomade » cher à Nicolas Bouvier.

« Je lis L’Idiot à Ouagadougou et l’idiot ne me rend pas heureuse mais me sort du temps où je vis. Dans le silence vertical de la rue ouagalaise aux heures brûlantes, je vois s’élever une datcha, des calèches, des duvets de neige. »

 

biographie

À 15 ans, un camp itinérant en Grèce révèle à Aude Seigne ce qui sera sa passion et son objet d’écriture privilégié pendant les dix années qui suivront : le voyage. En parallèle de ses études gymnasiales, elle commence donc à voyager pendant l’été : Grèce, Australie, Canada, La Réunion. Le lycée terminé, elle découvre le temps d’une année sabbatique l’Europe du Nord, de l’Est, et le Burkina Faso. Elle effectue ensuite un bachelor puis un master en lettres – littérature françaises et civilisations mésopotamiennes – pendant lesquels elle continue d’écrire et de voyager autant que possible : Italie, Inde, Turquie, Syrie. Tous ces voyages, ainsi que la rêverie sur le quotidien, font l’objet de carnets de notes, de poèmes et de brefs récits.

C’est à la suite d’un séjour en Syrie qu’Aude Seigne décide de les raconter sous la forme de chroniques poétiques. Parues en 2011 aux éditions Paulette, ces Chroniques de l’Occident nomade seront récompensées par le Prix Nicolas Bouvier au festival Étonnants Voyageurs de Saint-Malo, et sélectionnées pour le Roman des Romands 2011. La même année, le livre est réédité aux éditions Zoé.

En 2015 paraît Les Neiges de Damas, suivi en 2017, d'Une toile large comme le monde. Parallèlement, Aude Seigne travaille, avec Bruno Pellegrino et Daniel Vuataz, à la série littéraire Stand-by, dont les deux saisons sont publiées respectivement en 2018 et 2019.

Magazine Livresuisse

"Prix Nicolas Bouvier 2011, ces Chroniques ont révélé une écrivaine autant qu’une nomade dans l’âme, qui entre ses 15 et ses 23 ans parcourt le monde avec une passion brûlante, de l’Europe de l’Est en Australie, en passant par la Grèce, la Syrie et l’Inde."

Le Failler

"Un livre étonnant, touchant, profond, d'une qualité littéraire indiscutable, qui a reçu (et c'est amplement mérité) le prix Nicolas Bouvier au festival Etonnants voyageurs de 2011 !" Denis

L'Utopie

« Aude Seigne raconte les chemins empruntés, les villes et les personnes rencontrées, la jeunesse et l'envie d'aller voir ailleurs... C'est beau, tout simplement. » Morgane

Le Jour des silures (2023, domaine français)

Le Jour des silures

Dans un futur proche, la montée des eaux a eu lieu. Jeune présidente d’une ville pratiquement engloutie, Colombe croit à la décrue. Alors que la population se serre dans les derniers étages des immeubles et mène une vie nouvelle, communautaire, aquatique, Boris et Salömon, un duo de scaphandriers, plongent dans les rues à la recherche de vestiges et d’archives. Une mission qui n’est pas sans danger – surtout quand disparaissent les enfants et que rôdent les silures.

Terre-des-Fins (2022, domaine français)

Terre-des-Fins

Terre-des-Fins est une ville minière sur le déclin, un terminus du monde uniquement accessible par le rail. Liv, une jeune femme graffeuse, délinquante à ses heures, y voit débarquer Sora, une ambitieuse fille de la capitale, qui vient chercher en urgence l'œuvre d’un artiste. Liv se retrouve à servir de guide à la jeune citadine, dont le souhait le plus cher est de rencontrer cet artiste qu’elle vénère tant. Un récit d’émancipation sauvage et intime sous des allures de roman de gare.

Daniel Vuataz, Aude Seigne et Bruno Pellegrino écrivent à six mains depuis la série littéraire Stand-by. Ensemble, ils ont créé une écriture qui conjugue vitesse, observation et amour de la narration.

Les Neiges de Damas (2022, domaine français)

Les Neiges de Damas

En 2005, Alice passe l’hiver au Musée national de Damas pour répertorier des tablettes d’argile sumériennes. Entre le présent suspendu et les fragments millénaires, elle vit la fin de son adolescence et perd ses illusions sur l’état plane et serein que serait l’âge adulte. Cette expérience, elle la raconte six ans plus tard, quand la Syrie n’est plus que conflits. Mais plus qu’à la géopolitique, Alice s’intéresse à l’archéologie intime du monde. En cherchant une cohérence aux choses, elle apprend à être heureuse avec des questions plutôt que des réponses.

Postface de Véronique Rossignol

L'Amérique entre nous (2022, domaine français)

L'Amérique entre nous

Pendant trois mois, un couple parcourt les États-Unis en voiture. Ciels, villes, animaux, tout les émerveille. Ils en profitent pour vérifier les clichés européens sur l’Amérique. Elle interviewe les stars et tente de distinguer le vrai de la fiction ; lui photographie les geais bleus et les loups. Elle assiste à un mauvais match de baseball, ils traversent des incendies. La narratrice a pourtant un objectif plus important : elle aime deux hommes à la fois mais ne cesse de retarder le moment d’en parler à son compagnon.

Dans ce roman sur l’Amérique et l’amour libre, la narratrice procède à une enquête passionnée. Un va-et-vient vertigineux entre exaltation et blessures, doutes et ténacité, qu’accompagne une play-list accordée à la tonalité de chaque partie.

Stand-by - saison 2 (2019, Stand-by. Le feuilleton littéraire)

Stand-by - saison 2

Trois adolescents en cavale avec une journaliste quadragénaire lancée dans une quête mystique en Italie. Un médecin napolitain fraîchement diplômé, sur le point de mourir au Groenland, dans une base militaire abandonnée. Une jeune femme qui écume New York pour retrouver son ex-petite amie disparue. Chacun doit se frayer un chemin dans un monde profondément bouleversé par l’éruption d’un supervolcan qui, après avoir paralysé l’espace aérien européen, est en train de faire chuter la température sur toute la planète.

Une Italie post-apocalyptique, une Europe plongée dans l’écologie totalitaire, des États-Unis où le slogan « Make America White Again » est devenu la norme : voici la saison 2 du feuilleton littéraire Stand-by, à lire indépendamment ou à la suite de la première saison.

Langue précise et sensible, atmosphères et personnages au plus proche du monde d’aujourd’hui, Stand-by, écrit à six mains par Bruno Pellegrino, Aude Seigne et Daniel Vuataz, réconcilie littérature et séries télé.

Stand-by - l'intégrale de la saison 1 (2019, Stand-by. Le feuilleton littéraire)

Stand-by - l'intégrale de la saison 1

Suite à une éruption sans précédent à Naples, toute l’Europe se retrouve paralysée sous les cendres.

Sur le point de s’envoler de Paris pour New York, la journaliste Alix Franzen est contrainte de revoir ses plans. Nora, Vasko et Virgile, trois adolescents en vacances dans les Balkans, se retrouvent sans adultes et découvrent l’indépendance, grisante et inquiétante. Au Groenland, une équipe de jeunes Européens en mission climatique reste bloquée, loin de tout secours.

Au fil des premières heures qui suivent cette apocalypse volcanique, chacun va devoir s’en remettre à ses ressources personnelles pour affronter la réalité d’un monde nouveau.

Langue précise et sensible, atmosphères et personnages au plus proche du monde d’aujourd’hui : écrit à six mains par Bruno Pellegrino, Aude Seigne et Daniel Vuataz, le feuilleton Stand-by réconcilie littérature et séries télé. Voici la version intégrale de la première saison, récompensée en 2018 par le prix de la relève de la Fondation vaudoise pour la culture.

Stand-by 4/4 (2018, Stand-by. Le feuilleton littéraire)

Stand-by 4/4

Une semaine après l’éruption du supervolcan près de Naples, Alix a décidé de gagner l’épicentre du cataclysme : un périple dans une Italie apocalyptique.

Au Groenland, les Green Teens restés au camp de base sont tirés d’affaire, mais il faut retrouver les autres, disparus dans la tempête alors qu’ils étaient partis chercher de l’aide.

À Podgorica, Virgile, Nora et Vasko découvrent in extremis l’horrible secret d’Aden. En fuite après avoir laissé un corps inanimé, ils plongent dans l’excitation et la paranoïa, tandis que leur road trip balkanique se transforme en une course-poursuite infernale.

Le temps accélère, les actions se densifient : pas de happy end artificiel pour ce dernier épisode, mais un feu d’artifice qui clôt en beauté cette première saison de Stand-by.

Dessins de Frédéric Pajak

Stand-by 3/4 (2018, Stand-by. Le feuilleton littéraire)

Stand-by 3/4

Au Groenland, la neige engloutit les repères, tandis que les cendres commencent de voiler le ciel français. Sur les paysages monténégrins, les pluies acides laissent des sillons noirs.

Le supervolcan « crache, depuis des jours, des milliers d’années de roches patiemment mitonnées », et les protagonistes de Stand-by sont confrontés à de nouvelles réalités : l’oncle Aden a du sang sur les mains ; la mort frappe les Green Teens ; Alix n’est plus seule sur la route.

Dessins de Frédéric Pajak

 

Stand-by 2/4 (2018, Stand-by. Le feuilleton littéraire)

Stand-by 2/4

Un Groenland progressivement hostile, un Monténégro sous les cendres, une campagne française inquiétante et déserte : le décor de Stand-by est planté, place à l’action !

Alix a quitté Paris et entame une longue marche à travers la France, bravant les risques que peut courir une jeune femme isolée en pleine campagne.

Nora, Vasko et Virgile décident de partir pour Podgorica, où Vasko est attendu pour l’ouverture du testament de son père. Ils seront accueillis par l’oncle Aden, l’étrange frère du défunt.

Quant aux Greens Teens, ils sont condamnés à espérer un avion qui ne vient pas. Mais c’est sans compter un nouvel accident tragique qui va transformer leur attente en enfer.

Dessins de Frédéric Pajak

 

Stand-by 1/4 (2018, Stand-by. Le feuilleton littéraire)

Stand-by 1/4

Lorsqu’un volcan dans la région de Naples entre en éruption, un prodigieux nuage de cendres paralyse progressivement l’Europe, clouant les avions au sol et brouillant les communications. Sur le point de s’envoler pour New York depuis Paris, Alix Franzen doit revoir ses plans. Au Monténégro, Nora, Vasko et Virgile, trois adolescents, se retrouvent sans adultes et découvrent l’indépendance, grisante et inquiétante. Au même moment, les Green Teens – une équipe de jeunes Européens qui accomplissent leur Service climatique obligatoire – reste bloquée au cœur du Groenland, loin de tout secours.

Voici le récit des premières vingt-quatre heures qui suivent l’éruption.

Dessins de Frédéric Pajak

 

Une toile large comme le monde (2017, domaine français)

Une toile large comme le monde

Sous nos trottoirs et nos océans, des millions de mails transitent chaque seconde à travers des câbles qui irriguent le monde. Surfant sur ce flux continu, Pénélope, June, Birgit et Lu Pan mènent leur existence de « millénials » aux quatre coins de la planète. Fascination ou familiarité, dépendance ou dégoût, leur rapport au web oscille, dans leur travail comme dans leur vie amoureuse. En découvrant l’univers de boîtes et de fils qui les relient bien plus concrètement qu’ils n’imaginent, ils élaborent un plan vertigineux pour atteindre leur but commun : mener une existence hors de la Toile.

Ce roman est un génial selfie du monde contemporain, dans lequel virtuel et réel sont toujours plus intriqués.

Vous avez lu le roman et souhaitez en savoir plus sur l'empreinte écologique du Web, l'installation des câbles sous-marins ou le fonctionnement d'un data-center ? Rendez-vous sur https://wordswideweb.tumblr.com, le blog d'Une toile large comme le monde !

Carnets ferroviaires. Nouvelles transeuropéennes

Que ce soit de Lausanne à Paris, de Vienne à Genève ou de Glasgow à Londres, chacun des treize auteurs de ce recueil situe son histoire à bord d’un train qui parcourt l’Europe. À l’occasion d’un long trajet en chemin de fer, l’une se souvient de son voyage dix ans plus tôt, elle traque la différence entre son être d’hier et d’aujourd’hui. Un autre se remémore la géniale arnaque dont il a été l’auteur, un troisième retrace l’incroyable hold-up ferroviaire du South West Gang dans l’Angleterre de 1963.

Ces nouvelles donnent une vue d’ensemble inédite sur la manière de concevoir l’Europe comme espace physique et symbolique. Les auteurs étant de générations très diverses, le lecteur appréciera les différentes manières d’appréhender notre monde proche et de s’y situer.

Nouvelles de Aude Seigne, Blaise Hofmann, Anne-Sophie Subilia, Gemma Salem, Bruno Pellegrino, Arthur Brügger, Daniel Vuataz, Marie Gaulis, Fanny Wobmann, Catherine Lovey, Julie Guinand, Guy Poitry, Yves Rosset.

Préface de Daniel Maggetti, postface de François Cherix

Les Neiges de Damas (2015, domaine français)

Les Neiges de Damas

Disponible en poche

Voici un livre sur Damas qui ne parle pas de Damas. C’est un hivernage intime, un trajet de taupe, un enfouissement. Une saison d’hiver passée en 2008 dans le sous terrain du musée national de Damas à dépoussiérer, photographier et répertorier des tablettes sumériennes. Alice raconte cette aventure six ans plus tard quand la Syrie n’est plus celle qu’elle a connue. Alice est une jeune femme qui, quittant l’adolescence, perd l’illusion que l’âge adulte est un état plane et heureux, qui serait le résultat du chemin tortueux de l’adolescence.

Aude Seigne a de l’appétit, et sa faim est plus grande que le doute, pourtant constant chez elle. Sa curiosité est immense, réjouissante et captivante. Sa finesse d’analyse douce et précise. Son ouverture sur le monde lumineuse. Sur Les Neiges de Damas, elle dit : « C’est un nouveau type de voyage. C’est un livre contre l’obligation de conclure. » C’est un livre de la génération de ceux qui regardent le monde depuis l’après mur de Berlin. Une écriture non pas militante mais engagée d’une grande voyageuse au repos, qui cherche à apprendre à être heureuse avec des questions plutôt que des réponses.

Chroniques de l'Occident nomade (2011, domaine français)

Chroniques de l'Occident nomade

Lectrice du monde et d'elle-même, Aude Seigne, bourlingueuse du 21e siècle, écrit avec une acuité et une souplesse inédites sur le voyage et ses amours lointaines.

Le voyage ? Un exercice de légèreté. Un ravissement aussi : parce que parfois la beauté est terrassante, complète, trop forte, une illumination, une sorte d’orgasme métaphysique tremblant. « Quelque chose craque en moi, une paroi se rompt sans crier gare, la possibilité de l’abîme se dévoile en même temps que celle du bonheur absolu. »

L’amour ? Les premières fois, un flirt qui peut « la laver de tout », ou encore le grand amour.

Chroniques de l’Occident nomade a tout d’un roman d’apprentissage. Aude Seigne tatônne autour du globe comme dans sa narration, elle le sait et le revendique. Le voyage certes, mais pour être plus présente au monde.

Ouvrage disponible en poche : http://editionszoe.ch/livre/chroniques-de-l-occident-nomade-1

Chroniques de l'occident nomade (poche): extrait

I

Comment cela a-t-il commencé au juste? Pourquoi ce mouvement tout à coup, ces ailleurs, ces hommes? Est-ce que j’écris sur les voyages, est-ce que j’écris sur l’amour? Difficile à dire. Au début du mouvement, je vois un ferry qui arrive sur la Grèce un matin de juillet. J’ai quinze ans. Je me couche un soir sur le pont à Brindisi. J’ai quinze ans. Je vois mes compagnons de voyages dérouler un fin matelas de camping sur le ponton crasseux. Il n’y a pas un mètre carré de libre, il faut enjamber ces îles humaines comme on traverserait une rivière au lit peu marqué. J’entends d’ici la réaction petite bourgeoise qui crie en moi. Mais, on ne va pas dormir ici quand même? Je me réveille plus tôt que je ne le fais jamais par moi-même parce que j’étouffe de chaleur. Il est à peine 7 heures mais le soleil semble déjà se diriger vers nous de tous les horizons à la fois. Un de ces étouf- fements inouis, incroyablement violents et un peu agréables. Il faut imaginer ce que doit être la ouate chaude quand elle oppresse et bourdonne, comme un mal de tête qu’on peut soigner à l’ombre une après-midi d’été. Comment tout cela a-t-il commencé? Peut- être à ce moment précis. Je me redresse, les yeux bouffis. Sans même me lever de ma cou- chette de fortune, j’ai devant moi la mer scin- tillante comme un désert bleu. La vision est coupée en deux. Le désert de glace aveugle et défile alors que le ciel est d’un bleu pâle infini. J’ai quinze ans mais je ne me suis jamais réveillée sur un tel panorama et des milliers de générations d’humains ont dû le faire tous les jours avant moi. Quelque chose craque en moi ce jour-là, une paroi se rompt sans crier gare, la possibilité de l’abîme se dévoile en même temps que celle du bon- heur absolu. J’ai quinze ans, je pars en Grèce avec vingt autres ados et trois qui ne le sont à peine plus. Je suis en Grèce et fais des choses insensées. À Santorin, nous marchons deux heures sans eau, en plein soleil, au bord d’une route où passent des cars de touristes. Dans un petit restaurant d’Antiparos, nous mangeons une côte de bœuf chacun, deux fois plus large que l’assiette et que nous dévo- rons à mains nues. Pour le 1er août, nous achetons des sandales de cuir aux bergers et des robes très courtes qui ne masquent rien de nos corps d’adolescentes bronzées. À l’aube, nous marchons vite dans la partie déserte de l’île pour tenter de se coucher avant que le soleil ne se lève. Je m’étale dans le sable sous un buisson. Quand j’ouvre les yeux quelques heures plus tard, le visage rond et tendre du moniteur italien endormi fait face au mien. Je m’en rapproche encore un peu et referme les yeux. Un jour, nous mettons nos habits dans de grosses casseroles noires et traversons à la nage vers une île déserte en les poussant à la surface de l’eau. Nous passons la journée à parcourir ce caillou vierge que des centaines de jeunes arrogants ont dû, comme nous, fouler avec l’exaltation des grands découvreurs. Les pierres sont rouges, blanches, l’herbe drue. À l’opposé de l’île, nous traversons encore sur une île plus petite. Le désir d’aller au bout, tout au bout, d’aller le plus au bout que l’on puisse aller, comme j’irai au Cap Nord quand je serai en Norvège, comme j’irai dans les Pouilles quand je serai en Italie. En Grèce, nous chantons dans la rue, nous mangeons des gyros, nous dormons sur des plages dont il faut s’éloigner rapidement le matin car cela est interdit. Nous buvons des tequilas boum boum dans les bars de Ios et je prends des antibiotiques pour une allergie aux araignéesqui nous visitent, monstrueuses, pendant nos nuits champêtres. Dans les rues d’Ios, une jeune femme noire tombe, Vera pleure et un homme que je ne vois pas me brûle en haut de la cuisse avec sa cigarette. Je fume parfois des cigarettes sur les ponts des ferrys, la nuit. Je n’aime pas cela, je ne sais pas vraiment le faire et d’ailleurs je ne le fais même pas. Je tiens mal la cigarette, je n’aspire pas la fumée, je me retiens de tousser et j’ai mal à la gorge. Nous dormons parfois à l’intérieur des ferrys, dans les escaliers des restaurants chics dont la climatisation renforce le mal de gorge. Un jour, je me réveille sur le quai, debout, sac au dos. On me dit qu’on a eu de la peine à me réveiller, là-bas, dans le bateau, mais que je me suis finalement levée, que j’ai pris mon sac et que j’ai suivi le groupe. Som- nambulisme. J’ai des fourmis dans la main sur laquelle j’ai dormi. Il faut des preuves de ce qui arrive parfois. Nous nous lavons tous les quatre jours, tous les cinq jours. Le matin, les moniteurs découpent deux pains dans les grosses casseroles noires et donnent le signal du départ avant que la foule de boutonneux que nous formons ne se jette dessus. Nous achetons des cookies dans les kiosques des ports pour calmer la faim. Je porte toujours mon short en jeans très court, moulant, légèrement au-dessus de ma cicatrice de ciga- rette. À Paros, le moniteur italien me dessine de loin, sans que je le sache. Je suis assise en travers d’une chaise de toile, à l’ombre des pins. Il nous demande si nous avons déjà fait l’amour. À Athènes, il soigne mon insolation, qui me rapproche de l’idée de la mort. Nous sommes deux par lit dans un sous-sol couvert de blattes où il fait jour et nuit plus de 40 degrés sans air. Il pose des tissus de fraîcheur sur ma peau brûlante, tremblante. Je porte un soutien-gorge de petite fille. J’aurais de la peine à revivre aujourd’hui la scène sans y ajouter la dimension du désir, mais au fond peut-être que le désir y était déjà. En Grèce encore – mais sur quelle Cyclade, dans quelle fatigue heureuse ou insouciante? – Vera et moi nous douchons nues et blondes dans un camping. Nous comparons les marques de notre bronzage, résultat surprenant d’un écran solaire indice 60. On commence peut- être à se trouver belles, on rit beaucoup. Il faut encore partager les couchettes des trains lors du retour en Suisse via l’Italie. Nous buvons de la tequila ainsi que l’ouzo rapporté pour les parents. À Milan, le groupe entasse les sacs dans un coin de la gare et part en quête de petit déjeuner. Vera et moi sommes laissées pour les surveiller. Nous nous allongeons les bras en croix sur la cinquantaine de sacs poussiéreux et chauds en songeant que nous sommes ivres de tout pour revenir à Genève et retrouver nos parents quelques heures plus tard. C’est peut-être ainsi que tout a commencé.